[HRP : Je poste ici la suite et fin de mon RP situé dans le narr.indiv., ici. Le timing n'est pas parfait pour mettre ce dernier chapitre là-bas, mais vous, vous pouvez le lire, je n'en changerais pas une ligne.]
La jeune femme assise seule sur le sable lisait le livre de ses ancêtres avec une attention désormais toute différente. Envolé l'amusement, évaporé le rire, toutes ces choses étaient à présent répandues en flaque devant elle. Elle réfléchissait. Ce qui ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Elle avait tout fait pour. Réfléchir, c'était le meilleur moyen de ne plus penser à l'immense succès comique de la Dernière Représentation des Gargari; mais juste au suicide sanglant et gore de ses parents qui avait eu lieu devant ses yeux.
Réfléchir, c'était se préoccuper des questions que soulevaient les évènements de la surface
Johannes Gargari, 19 Janvier 1865
C'est terminé. Je ne sais même plus pourquoi je m'évertue à rédiger ces lignes, tout est fini. La Troupe Gargari n'existe plus. Le rêve de mon glorieux père s'est éteint. Et ce soir, je disperse ces mots dans le vide, en sachant que toi, enfant du futur distant, tu ne pourras point les lire. Car tu n'existes point. Ce journal est l'épitaphe de ta vie qui n'a point pu avoir lieu.
Mon brave fils, mon petit héros, celui que dont j'ai vu les yeux s'ouvrir sur le Monde...Mon petit Ludwig est mort. Massacré par ces sales Yankees. Piégé dans une embuscade alors qu'il s'était porté volontaire pour délivrer un message de la plus haute importance. Notre sang de la belle Autriche, son dernier calice charnel, répandu sur le sol bâtard de l'Union pour que les nègres s'en abreuvent.
C'est plus qu'un homme ne puisse supporter. Et comme si cela ne suffisait pas, ma propre épouse Edwig refuse de m'adresser la parole. Elle s'occupe de ses propres affaires, et m'étale son mépris et son dégoût perpetuel au visage. Je crois qu'elle sait pour XXXXXXXXXXX du lire les dernières lignes que j'ai écrites ici même.
Honte ! Infamie ! Elle le sait, et je le sais ! Maintenant que Ludwig est mort, le seul réceptacle de notre sang est le fruit de cette négXXXXXXXX JE T'AI POURTANT DIT DE NE PAS SOUILLER SON NOM !et savoir notre sang sali dans les veines de cet enfant immonde, cette erreur de la nature, ce sale nègre bon à rien et insolent, ce ET BAH DIS DONC, CA FAIT DU BIEN DE SE SAVOIR APPRECIE AHAHAHAHAHAHAH ! C'EST RECIPROQUE, VIEUX CONNARD INFERNAL ! nettoyer les fientes d'âne.
Comment un homme peut-il encore prétendre vouloir faire rire si ce genre de honte lui tenaille les boyaux ? Comment après avoir dédié sa vie au rire et au spectacle, on en vienne à voir la noirceur du Monde et du Destin dans chaque regard d'enfant ? Pourquoi chaque sourire d'enfant est-il devenu un poignard dans ce vieux coeur qui sait que toi, petit enfant Gargari, tu ne pourras point sourire, car tu ne verras jamais le jour ?
S'il en est ainsi, si c'est Dieu qui l'a voulu, et bien soit. Je marcherais seul vers ma fin.
Il s'agissait du dernier message de Johannes Gargari dans le journal. Fun se prit à pousser un soupir après cette lecture. Un soupir...de soulagement presque. Comme si une certaine pression venait de s'envoler.
Mais visiblement, Johannes n'était pas doué de dons de voyance. Car le journal ne s'arrêtait pas là. Il se poursuivait encore sur des pages et des pages, par centaines, et ce jusqu'au dernier mot que son propre père y cala avant de mourir. La lignée Gargari ne s'était pas arrêtée avec Johannes. Il s'était trouvé quelqu'un pour prendre la suite.
La "deuxième écriture". Cet homme qui avait saccagé le récit de son prédécesseur à la seconde ou il l'avait tenu entre les mains...avant de remplir son devoir de le poursuivre.
Donkey Poo Gargari, 20 Mars 1877
...et c'est donc à moi, "Donkey Poo" Gargari de poursuivre la rédaction de ce ronflant journal, puisse-t-il traverser les siècles, et blablabla.
Mon horrible géniteur, Johannes Gargari, puisse Satan lui embrocher le coeur et le faire rôtir sous ses yeux, est décédé hier...de la vérole ou autre chose, AHAhahahAHAHAh ! Hmm...désolé, blague personnelle...Je disais donc, qu'il est décédé après une lente agonie pendant laquelle il a vu les siens l'abandonner, le Sud se faire aplatir comme une crêpe, et nous autres, "nègres" qu'il détestait tellement acquérir leur liberté.
"Liberté"...est un bien grand mot pour la plupart d'entre nous. Mais moi, j'ai eu de la chance. Là encore "chance" est un bien grand mot, il s'agit de la "chance" que ma mère, Dieu ait son âme sainte à jamais, se soit fait violée par le riche propriétaire de cirque dont elle était l'esclave; et qu'à la mort de ce dernier, son épouse qui le haïssait décide de l'humilier par-delà la tombe, en me confiant tout son leg, à moi, le nègre Donkey Poo, le nettoyeur des merdes d'âne, l'unique héritier des Gargari.
Ce cirque est le mien à présent, et il restera dans la famille. Ca ne sera pas facile de nous faire accepter, ni même de recruter, mais nous voyagerons vers le Nord; nous avons des idées, et du talent, et nous sommes près à tout pour exister, pour défendre nos appuis de nègres dans ce monde de blancs.
Et qui sait, peut-être que toi, enfant de....AhahahaHAHAH sang pur Gargari qui lit ces lignes, dans un futur distant, tu es plus riche encore que le plus riche des blancs.
Je reprends donc ce journal horrible, au lieu de le trainer dans la fange ou il devrait être. Si je le fais, c'est uniquement pour m'assurer que la honte et l'humiliation de mon horrible géniteur traversera les siècles pour aterrir jusqu'à toi...enfant Gargari de sang noir.
Puisse la haine dont la vie nous a nourri ne jamais s'abattre sur toi et les tiens.
Fun Gargari poussa un nouveau soupir, et jeta un nouveau regard au visage que lui renvoyait le reflet dans le dos de la pelle. Et la lueur d'ébène confirma cette évidence. Ca n'avait jamais eu d'importance pour elle...sous le maquillage, rien n'avait jamais d'importance, de toutes façons. Mais pour cette lune, cet infime moment durant lequel le maquillage avait fondu...elle était confrontée à la réfléxion. Aux choses sérieuses.
Elle était noire.
Et sacrément dans la merde.
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